Les
nouvelles épreuves de baccalauréat en SES ont permis de tester les candidats de
l'état de leurs connaissances sur une large partie du programme. En proposant,
quelques rapides éléments de correction sur les deux sujets proposés cette
année, nous pouvons nous rendre compte que les savoirs issus de la sociologie
et des sciences économiques permettent aux élèves suivant l'enseignement de SES
de mieux comprendre les grands enjeux économiques et sociaux du monde
contemporain.
Deux
sujets étaient proposés aux élèves. L'épreuve composée teste la capacité des
élèves à restituer des connaissances, à analyser un document et à rédiger un
texte argumenté. La deuxième partie (analyse) met en avant les profondes
inégalités de patrimoine en France. A partir d'un tableau de l'INSEE publié en 2011, on constate que les 10% les
plus riches en France possèdent 48% du patrimoine total, lorsque les 10% les
plus pauvres possèdent moins de 0,5% du patrimoine totale. Lorsqu'on
s'intéresse à la moitié de la population la plus riche, on constate que les 50%
plus riches des français possèdent en 2010, 93% du patrimoine total.
La
troisième partie (argumentation) demandait aux élèves d'expliquer que les
conflits sociaux peuvent être un facteur de cohésion sociale. De nombreux
exemples d'actualités peuvent être mobilisés par les élèves sur cette question,
on pense tout récemment aux manifestions au Brésil, celles en Turquie visant à
dénoncer le tournant autoritaire du pouvoir, les révolutions du printemps Arabe
ou encore le mouvement des indignés. Alors que le conflit est souvent perçu
comme source de désordre social, on a tous en tête les images d'émeutes ou de
débordements à la suite de manifestations « houleuses » il apparaît
que les conflits peuvent participer à intensifier les liens sociaux entre les
individus membres de la société, et à renforcer les solidarités entre eux. Pour
Karl Marx, les conflits sont le moteur de l'histoire. On peut mettre en avant
l'efficacité des conflits pour améliorer le partage des richesses issus des
activités de production, obtenir des protections pour les travailleurs. Les
accords de Grenelle suite aux grèves de mai 68 ont abouti par exemple sur une
augmentation de 35% du salaire minimal. Les conflits sont souvent à l'origine
des acquis sociaux et des différents dispositifs de solidarité. De la même
manière, le conflit permet de créer l'unité d'un groupe, il participe à la
socialisation politique des individus s'engageant dans le conflit et contribue
à diffusion de valeurs communes, parfois nouvelles, entraînant parfois des
changements sociaux et culturels importants.
Le
sujet de dissertation interrogeait les élèves sur les déterminants des stratégies d'internationalisation de la production des
firmes multinationales. Les FMN disposent d'unité de production dans
plusieurs pays, le sujet invite ainsi à s'interroger sur les motivations des
entreprises à s'implanter dans différents pays. Les FMN à travers les
investissements directs à l'étranger jouent un rôle central dans la
mondialisation dont l'une des caractéristiques est la fragmentationinternationale des processus productifs.
On
peut mettre en avant deux objectifs principaux des entreprises qui orientent
leurs stratégies de localisation: la recherche des coûts minimum et la volonté
d'innover. Dans le premier cas, on peut évoquer plusieurs critères permettant
de comprendre pourquoi une entreprise s'installe dans un pays et pas dans un
autre:
- l'approvisionnement en matière première à moindre
coût. L'entreprise
Michelin par exemple pour produire des pneus possèdent 6 exploitations d'Hévéa
au Brésil et au Nigéria dans le but de se fournir en ressources primaires;
- la fiscalité d'entreprise avantageuse. L'entreprise
Amazon a installé son siège social européen au Luxembourg où elle bénéficie
d'une fiscalité défiant toute concurrence;
- la distance entre les lieux de production et les
marchés de consommateurs. La
baisse des coûts de transport passant de 7,7% du prix des importations CAF en
1970 à 6.3% en 2000 a permis aux entreprises de s'installer plus loin des
grands marchés de consommateur (USA, Europe) au profit des régions au faible
coût de main d'œuvre;
- le faible coût du travail pour les secteurs
d'activité dont la production est intensif en main d'œuvre. Dans
le secteur textile par exemple, nécessitant un grand nombre de travailleurs
(comparé aux besoins technologiques), on comprend qu'une entreprise préfère
s'installait en Inde, au Vietnam ou au Pakistan où le coût horaire du travail
est inférieur à 1$ qu'en Europe où le coût horaire est de 28,17$ en Allemagne,
ou de 21,61$ en France dans le textile. Cependant,
d'après le Baromètre Ernst&Young de l'attractivité en Europe publié en
2009, les motivations liées au coût de production ne sont pas les premiers
critères cités par les entreprises comme élément central dans leurs choix
d'implantation. En effet, Pour près de 50% des 809 décideurs internationaux
interrogés la qualité des infrastructures logistiques mais également la qualité
de la main d'œuvre sont les critères importants alors que 45% des entrepreneurs
considèrent important le coût de la main d'œuvre et seulement 35% d'entre eux
jugent important le niveau de flexibilité du marché du travail comme critère
d'implantation.
Ainsi,
dans un deuxième temps il apparaît que d'autres éléments motivent les choix
d'internationalisation de la production des FMN. Les entreprises sont en
concurrence sur un marché et le meilleur moyen d'affronter la concurrence et
donc de pérenniser son activité dans le temps, reste la capacité à innover et à
se différencier des concurrents. C’est ce que les économistes nomment la compétitivité
hors-prix. En effet, Pour Joseph Schumpeter, l'entrepreneur est marqué par sa
soif d'innovation, il est un aventurier doté d'un fort esprit d'initiative et
d'un goût pour le risque. C'est d'ailleurs l'un des éléments qui justifiera
dans certains cas la forte rémunération des dirigeants des entreprises
innovantes. Certains éléments vont donc influencer les choix d'implantation des
entreprises comme le niveau de qualification de la main d'œuvre ou encore les
technologies disponibles. Ainsi, par exemple, l'entreprise Michelin a installé
un centre de technologie aux USA, en France et aux Japon, trois pays dont le
niveau de capital humain est particulièrement élevé.
Un pays qui souhaite attirer
les entreprises doit en effet mettre en place des mesures en direction de la
compétitivité-prix de son territoire, comme le rapport Gallois le préconise,
mais ne doit pas négliger sa compétitivité hors-prix. On peut s'interroger cependant
si la division international des processus productifs ne met pas les modèles
sociaux des pays en concurrence de manière excessive, mettant en péril un
certains nombres d'acquis sociaux.
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