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"Un homme sérieux a peu d'idées. Un homme à idées n'est jamais sérieux" Paul Valéry


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Hollande ou Holland?

mercredi 25 avril 2012

Comme d'habitude, une belle inspiration de Kipper Williams pour The Guardian. 


Immigration? Quelle immigration?

mardi 24 avril 2012
Depuis près de deux ans, le blog EcoInter view, consacré à l'économie internationale, casse les préjugés sur l'impact économique de l'immigration. Je me permets de résumer certaines de ses notes, accessibles ici. Plusieurs idées reçues coexistent. 

D'abord, immigration ne veut pas dire couloir d'étrangers mais également retour au pays de Français vivant à l'étranger ou qui sont même nés à l'étranger. Sur 100 migrants qui s'installent en France, 30 sont Français

En ce qui concerne les migrants des pays extra-européens, ils représentent 90 000 immigrés en France contre 237 000 en Allemagne et 490 000 en Espagne. Pour Eurostat, seul 6% des immigrants extra-européens proviennent d'un pays ayant un faible IDH. En fait la France est un pays très fermé comme le souligne cette note Natixis, loin derrière l'Allemagne, l'Espagne ou l'Italie, au risque même d'un coût pour la croissance économique.

En France, l'immigration est largement imaginaire. Elle résulte en fait de la confusion entre immigrés et personnes d'origine étrangère. Les Français sentent une pression migratoire qui n'existe pas. En atteste le graphique suivant. 






Le simulateur des résultats du second tour

lundi 23 avril 2012
Un simulateur des résultats du second tour est accessible sur le site de la fondapol.

Ma simulation montre que l'élection est loin d'être acquise. 




Votez si bon vous semble mais faites le rationnellement

dimanche 22 avril 2012
C'est aujourd'hui le premier tour des élections présidentielles. Sur les réseaux sociaux, deux tendances s'opposent. Ceux, majoritairement de gauche, qui vous incitent à aller voter parce qu'ils craignent un 21 avril 2002 bis, journée où l'abstention importante avait favorisé le passage au second tour de Jean-Marie Le Pen dont les électeurs se mobilisent traditionnellement pour aller voter. Ceux, majoritairement de droite, qui insistent sur la mobilisation des électeurs, en espérant y trouver le signe de l'inversion de la tendance des derniers sondages. Ma vision des choses est que le vote est un droit avant tout, un devoir civique en second lieu. Votez si vous le souhaitez mais votez rationnellement. 

Traditionnellement, on considère en économie que les électeurs sont soit rationnels (cohérents avec leurs préférences) mais mal informés, soit irrationnels. Dans le premier cas, ils pensent voter pour le candidat qui satisfera le mieux leurs intérêts privés mais sont victimes d'un manque d'information - ils ne connaissent ni les motivations réelles des candidats, ni même leurs programmes - qui peuvent expliquer le mauvais calibrage de leur vote. Dans le second cas, plus cohérent avec les autres sciences sociales, les "erreurs" de vote ne sont pas aléatoires mais systématiques, en fonction de biais sur les valeurs et les croyances des électeurs. La dimension émotionnelle est donc importante et laisse place à la démagogie, au populisme ou à la perception de l'efficacité des candidats. Le vote est alors irrationnel car il n'est pas systématiquement représentatif des intérêts privés des électeurs, ni même systématiquement biaisé en faveur d'une croyance ou d'une autre. 

Faut-il réduire le vote à un simple choix de consommation? Sûrement pas, lorsque l'on vote ou que l'on s'abstient, le poids du vote n'a a priori aucune conséquence. En France, un électeur n'est qu'une voix parmi 44 millions. Pire encore, le vote permet de se racheter une bonne conscience, ou de promouvoir le bien commun: je vote à droite parce que je pense que la droite va mieux gérer la dette publique, je vote à gauche parce que je  souhaite une diminution des inégalités. Le vote ne doit pas suivre le bien commun mais le bien individuel. Votez si vous le souhaitez mais votez rationnellement!

Retour sur l'impôt à 75%

mardi 10 avril 2012



La proposition de campagne du candidat du parti socialiste de taxer les hauts revenus à 75% a suscité de nombreuses réactions jusque dans les tribunes des stades. Pour un débat serein, il serait nécessaire de rappeler quelques éléments éclairant cette mesure afin de dépasser la seule question de l'avenir de la Ligue 1 sans évidemment nier l’impact que cela pourrait avoir sur le niveau du championnat.

Pour rappel, le barème d'imposition est actuellement le suivant.

Barème impôt 2012
TRANCHE DE REVENUS 2011
TAUX D’IMPOSITION 2012
Revenus jusqu'à 5 963 euros:
0 %
De 5963 à 11 896 euros:
5,5 %
De 11 896 à 26 420 euros:
14 %
De 26 420 à 70 830 euros:
30 %
Plus de 70 830 euros:
41 %

Ce barème est progressif par tranche de revenus. Condorcet définit l'impôt progressif dès la fin du XVIIIème siècle comme « l'impôt qui augmente plus que proportionnellement que la valeur imposée ». Il légitime un tel impôt par le fait qu'il serait insoutenable de taxer les revenus « dans lesquels on comprend tous les moyens de subsister », c'est donc sur « l'excédent seul qu'il doit être placé».

De plus, et là est l'originalité de Condorcet, pour lui les riches sont également les premiers à profiter des dépenses publiques. La construction des routes au XVIIIème siècle favorisa largement les affaires privées et les déplacements des plus riches comme aujourd'hui, le financement public des aéroports et des ports de commerce permet d’alimenter les profits des détenteurs de capital. Ces dépenses effectuées en vérité au nom de l'intérêt général mais dont il résulte des jouissances particulières pour les plus aisés rend l'impôt progressif conforme à la justice.

Si les écrits de Condorcet sont déjà anciens, l'idée de progressivité de l'impôt ne finira à s'imposer en France qu'avec les réformes Caillaux de 1914 et 1917 dans le contexte de la première guerre mondiale. Au départ dans l'optique de lever des fonds supplémentaires pour l'effort de guerre, l'impôt progressif s'avère également un outil efficace de lutte contre les inégalités.

Les travaux récents de Camille Landais, Thomas Piketty et Emmanuel Saez ont à ce sujet démontré que l'impôt sur le revenu dans l'état actuel des choses était faiblement progressif. Pour eux le système fiscal français est régressif lorsque l’on considère les taux moyens d’imposition des ménages. Si cette étude n'est pas exempte de critique, une réforme de l'impôt sur le revenu est souhaitable afin de gagner en lisibilité mais également dans le but de rendre plus juste cet impôt.

Face à la nécessité de rééquilibrer les finances publiques, les solutions miracles ne sont pas légions. Il faut soit augmenter les recettes publiques, soit diminuer les dépenses publiques. Si comme je le pense contraindre les dépenses publiques n'est pas souhaitable à court terme, alors l'Etat doit trouver de nouvelles ressources, là où la taxation doit être le moins distorsive possible.

Où trouver ces ressources supplémentaires?

Il est possible, comme le Président actuel l'a décidé de faire peser cette charge à l'ensemble des français, en taxant plus nos consommations finales à travers l'augmentation de la TVA de 19,6% à 21,2% à partir du 1er octobre 2012. Cette mesure a l'avantage pour l'Etat de faire rentrer près de 10 milliards d'euros de recettes supplémentaires par an. Cette taxe a le mérite de pouvoir facilement lever des fonds et d’être transparente. En revanche, elle pèse plus sur la consommation des bas revenus qui ont une propension à consommer plus forte...Elle fera augmenter le taux moyen d’imposition sur les bas revenus.

François Hollande, de son côté, veut faire peser une partie de la charge de la dette sur les plus hauts revenus avec un taux marginal à 75% au seuil d’un million d’euros par an. 10 000 français seraient concernés par cette nouvelle tranche d'imposition.

Si comme Christophe Jallet (joueur du PSG monté au créneau dans les médias contre cette proposition) votre revenu mensuel s'élève à 100 000 euros, alors votre taux moyen d'imposition sur le revenu passerait de 27,7% à 33,3%. En volume, l'augmentation d'impôt pour un contribuable ayant un revenu brut annuel de 1 200 000 euros, s’élèverait à environ 65 000 euros supplémentaires suite à l'augmentation du taux marginal d'imposition.

Quel impact sur les inégalités?

Les inégalités de revenu se sont réduites tout au long du XXème siècle. Les 10% des plus haut revenu en 1900 représentent près de 45% du revenu total contre 34% aujourd'hui. A la sortie de la seconde guerre mondiale, l'écart inter-décile entre les 10% les plus aisés et les 10 % les plus pauvres, est de 1 à 9. En 2000, cet écart est de 3,2.

Loin des inégalités du XIXème siècle, nous observons depuis 10 ans la fin du recul des inégalités économiques. Camille Landais considère d'ailleurs que nous avons retrouvé le rythme de croissance des inégalités de la fin du XIXème siècle. L'écart inter-décile s'est remis à croître. Les inégalités tendent à s'accroître par le haut de la distribution des revenus. Entre 2004 à 2008, les 0,01% les plus riches ont vu leur revenu annuel s’accroître de 180 000 euros. Sur la même période, la France a vu le nombre de personnes franchir le seuil de pauvreté augmenter pour la première fois depuis longtemps, passant la barre des 8 millions de pauvres. Tendre vers une fiscalité plus redistributive semble nécessaire aujourd'hui pour endiguer la dynamique des inégalités.

Que faut-il en conclure ?

Ainsi, un tel barème sur l'impôt permettrait de limiter les inégalités résultant des très hauts revenus. Cependant pour réduire le spectre des inégalités, il faudrait que cette augmentation de l'impôt des 0,02% des plus riches s'accompagne d'une diminution ou d’une stabilisation du taux d'imposition des 99,98% restant. Le contexte actuel ne semble pas propice à une telle décision.

Au niveau moral, il présente l'avantage de ne pas faire supporter aux personnes ayant les revenus les plus fragiles le poids de la dette publique. L'enjeu est également de limiter l'ampleur des revenus les plus indécents au regard de ceux du reste de la population. A titre d’exemple, les patrons du CAC 40 ont une rémunération annuelle moyenne de 2 millions d'euros soit environ 150 SMIC. Aucun talent particulier ne semble justifier de tels écarts. Une juste répartition des revenus est un facteur de cohésion sociale à ne pas négliger. Le PS propose ainsi d’encadrer de 1 à 20 la carte des salaires dans les entreprises publiques comme le souhaitait JP Morgan.

Enfin, face à ce nouveau barème, il faut s'attendre à des réactions comportementales complexes à anticiper. En théorie, les individus concernés pourraient en effet décider de quitter le pays, ou encore d'ajuster leur temps de travail afin de ne pas être imposés plus, ce qui diminue en retour les recettes fiscales totales. En réalité, la fuite devant l’impôt serait encore limitée et l’incitation au travail ne joue que sur les bas revenus.

Si François Hollande est élu, il n’est donc pas sûr que les joueurs du PSG jouent mieux pour avoir des primes de résultats comblant la diminution de leur revenu suite à l’augmentation des impôts. Cela pourrait même faire l'objet d'un prochain post.