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Les inégalités, moteur de la crise financière?

mercredi 6 avril 2011






Plusieurs économistes ont pointé du doigt le rôle des inégalités comme origine de la crise des subprimes. Aux Etats-Unis Raghuram Rajan, professeur à la Booth School de l'Université de Chicago, dans un livre intitulé "Fault Lines" établit un lien direct entre les inégalités aux Etats-Unis et la crise financière de 2007. Son argument est le suivant. D'abord, le progrès technologique biaisé en faveur des travailleurs qualifiés a entraîné des écarts importants de rémunération. Ensuite, face à la montée des inégalités, les politiques ont favorisé le crédit plutôt que l'investissement dans l'éducation et dans la formation professionnelle. L'augmentation des qualifications aurait permis d'augmenter l'offre de travailleurs qualifiés et ainsi diminuer leurs salaires. La conclusion de Rajan est donc double. Premièrement, les politiques de lutte contre les inégalités peuvent amener à une crise financière de grande ampleur, phénomène qui ne peut se produire que si les inégalités sont importantes. Deuxièmement, les bonnes politiques de lutte contre les inégalités ne sont pas celles qui permettent de consommer plus par le crédit mais celles qui passent par l'éducation et la formation.

En France, deux auteurs que je connais bien, expliquaient dans le livre "Reprise ou re-crise?" que la crise des subprimes trouvait son origine dans la pyramide de distribution des salaires américains. Celle-ci se caractérise par une base large de salariés à faible revenus qui doit vivre à crédit. Les innovations financières ont permis de diviser de façon illusoire le risque des mauvais emprunteurs incitant ainsi les établissements financiers à prêter aux plus démunis. Ce qui apparaissait comme du "capitalisme social" n'était en fait qu'un moyen d'entretenir une croissance déséquilibrée dans laquelle les plus pauvres devraient finalement payer l'addition, soit en perdant leur bien immobilier hypothéqué, soit en perdant leur emploi. Les auteurs préconisaient un salaire minimum national aux Etats-Unis pour éviter un recours massif au crédit.

Ces lectures de la crise nous amènent à la question suivante : est-ce que ce sont les inégalités ou une mauvaise politique économique de lutte contre les inégalités qui ont précipité l’économie mondiale dans la crise ? Ou la réponse est-elle à chercher du côté du manque de régulation financière de l’économie américaine ?

Il semble que les inégalités elles-mêmes ne soient pas à l’origine des crises mais plutôt que l’intervention gouvernementale dans le marché du crédit pour réduire les inégalités puisse s’avérer contre-productive. Il ne faut pas pour autant mettre de côté l’importance de la dérégulation financière dans la prévention des crises économiques. La dérégulation financière a entraîné des profits énormes alors que les salaires dans la finance ont augmenté, créant une explosion des très hauts revenus et des inégalités, à l’origine même des politiques de soutien au crédit. Une politique juste de lutte contre les inégalités serait donc celle qui permet la bonne régulation des marchés financiers d’une part et des modèles de rémunération de grandes entreprises qui dépendent aujourd’hui beaucoup des cours de marchés.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

A mon avis ca n'est pas tant la volonté de remédier aux inégalités qui a précipiter la crise mais le moyen choisi. Le marché n'a jamais eu vocation à faire de la redistribution, et permettre aux plus pauvres de s'endetter davantage c'est créer un boulevard pour les prédateurs du marché. Des ménages qui peuvent s'endetter sur plus d'une génération ca fait froid dans le dos. On en revient étrangement à la théorie Malthusienne car finalement la valeur de l'actif se rapporte à la rentabilité actualisée net des ménages. Dans ce calcul cynique on entrevoit clairement la dynamique des théories basées sur la démographie. Car si les réformes mises en place visaient à favoriser l'accès à la propriété des ménages, ceux-ci ne pouvaient acheter qu'a condition que la valeur actualisée net du bien leur permette de générer un gain. c'est ce même gain que les financiers se sont acharnés à grignoter. Je considère pour ma part que si vous contracter un dette équivalente à la somme de ce que vous pouvez rapporter par votre travail (si vous n'avez que ça), et durant toute votre vie, alors vous êtes irrémédiablement esclave de vos créanciers. Le délire ira même plus loin aux Etats-Unis avec des durées d'endettement allant au delà du siècle. vous voilà donc à la tête d'une dynastie d'esclaves. Le cynisme de la réponse fait écho à celui de la question.
Réduire les inégalités? permettre l'accès à la consommation? autant de questions abstraites au sein d'un rapport de forces déséquilibré. En somme les valeurs des individus s'estompent devant la valeur des biens et la valeur des biens excède celle des individus.

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