La publication par WikiLeaks de 250 000 télégrammes diplomatiques n’en finit pas de surprendre. Chaque jour, de grands quotidiens nationaux offrent une synthèse des relations diplomatiques internationales. Faut-il se réjouir d’une telle divulgation de documents destinés à rester confidentiels ou au contraire qualifier d'irresponsables les membres de WikiLeaks?
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De nombreux commentateurs estiment que la divulgation de ces télégrammes est préjudiciable pour les démocraties : en effet, elle peut mécontenter des alliés et accroître les tensions entre différents Etats et la susceptibilité de certains dirigeants. Les marges de manœuvre diplomatiques s’en trouveraient réduites alors que les menaces et les crises à résoudre sont toujours plus nombreuses. Selon cette approche, la transparence serait l’apanage des dictatures, lesquelles ne distingueraient pas la sphère privée de la sphère publique pour mieux contrôler les individus. En publiant de tels documents, WikiLeaks aurait agi comme Big Brother et menacerait la sécurité de nombreuses sources diplomatiques dans le monde.
En fait, les démocraties se sont précisément constituées sur la transparence, par opposition à l’opacité caractéristique des régimes despotiques. C’est ainsi que la publicité est au cœur de leur fonctionnement: les lois sont délibérées avant d’être promulguées, les décisions rendues publiques et expliquées, et le débat d’opinion est libre. Les seules restrictions concernent la raison d’Etat, laquelle est utilisée pour justifier le secret.
Au delà de l'interêt que peut susciter la retranscription des télégrammes, c'est la question de la place du secret et de la raison d'Etat dans une démocratie que pose WikiLeaks. Pour ce dernier, la diplomatie doit être placée sous le contrôle des citoyens et rendue publique comme le souhaitait le Président américain Wilson en 1918. Pour ses détracteurs, la diplomatie doit rester un domaine réservée de l'Exécutif et soustrait au contrôle du parlement et de l'opinion publique. En rendant public des télégrammes traditionnellement confidentiels, WikiLeaks renforce le contrôle démocratique des citoyens sur la diplomatie.
Reste que les révélations du site australien surprennent davantage par leur tonalité, directe et sans nuance, et par certaines anecdotes, que par le contenu des notes diplomatiques, lequel ne faisait pas mystère. WikiLeaks révèle alors moins les secrets diplomatiques des Etats que la progressive évolution du métier de diplomate: celui-ci ne fait plus preuve de subtilité pour décrire et expliquer les opinions des dirigeants. C'est peut-être cela qu'il convient de regretter.
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