Dans un article récent, j’évoquais le rapport des femmes au bonheur: en dépit de la réduction des inégalités salariales, les femmes sont moins heureuses aujourd’hui qu’il y a trente ans. Une des raisons est que l’écart salarial de 30% entre hommes et femmes est plus difficile à supporter compte tenu de l’égalisation des diplômes et des positions. Une explication avancée pour cet écart salarial est que les hommes ont un côté machiavélique qui leur permet de négocier un salaire plus élevé. L’écart salarial ne reflète pas un écart de productivité mais une différence de personnalité, de préférences et de principes. Si certains prônent une subvention pour les femmes, c’est plutôt une pénalisation plus grande des tricheries (essentiellement masculines) qui devrait être mise en place.
Une autre raison invoquée pour expliquer cet écart salarial est le nombre d’absences liées aux périodes menstruelles. J’évoquais dans l’article précédent l’impact de l’absentéisme liée aux périodes menstruelles sur la carrière professionnelle des femmes. Dans les pays en développement, le cumul d’absences scolaires liées aux règles entraîne de moindres qualifications et des discriminations salariales et sociales envers les femmes qui seraient évitables. Selon la Banque Mondiale, les jeunes filles peuvent manquer jusqu’à 20% des cours d'une année scolaire à cause de leurs périodes menstruelles.
Une étude menée sur des adolescentes au Népal tente de quantifier l’impact des périodes menstruelles sur la présence à l’école des jeunes filles. Environ la moitié de l’échantillon étudié a manqué l’école au moins une fois à cause de la menstruation. Mais en réalité, l’impact de la période menstruelle sur l’absentéisme scolaire est beaucoup plus faible qu’il n’y parait. Lorsqu’elles n’ont pas leurs règles, les filles sont à l’école dans 86% des cas ; lorsqu’elles ont leurs règles, elles sont à l’école dans 83% des cas. Elles ne manqueraient donc qu’un tiers de journée d’école par an à cause de leurs règles.
Les économistes qui ont mené l’étude ont expérimenté la fourniture de produits sanitaires (tampons, serviettes, etc.) à la moitié de l’échantillon pour voir s’il y avait une différence d’absentéisme entre les jeunes filles ayant accès à ces produits et celles qui n’y avaient pas accès. Aucune différence notable n’a été obtenue pour combler l’écart, déjà très petit, entre absentéisme avec ou sans règles. On ne peut toutefois pas conclure que l’absentéisme scolaire des femmes ne soit pas lié à des problèmes « purement féminins » car aucun contrôle sur le taux de fécondité de ces jeunes filles n’est réalisé. Dans ce cas, la contraception serait également un problème important à traiter.
Mais l'argent ne fait pas tout. D'ailleurs les femmes sont-elles moins heureuses que les hommes dans leur vie professionnelle et privée? Une étude de 2008 sur les occupations des américains et sur la manière dont ils perçoivent le temps passé (agréable ou non) montre les résultats suivants.
Deux résultats sont frappants. D’abord l’écart selon le genre pour le temps « désagréable » passé avec son supérieur hiérarchique. Les hommes auraient a priori des relations plus tendues avec leur patron, ce qui contredit l’aspect discriminatoire du travail pour les femmes, en tout cas une fois qu’elles sont effectivement dans l’emploi.
Ensuite, les femmes ont généralement moins de plaisir à passer du temps i) avec leurs enfants et ii) avec leurs parents. Pour les enfants, la raison est simple : les femmes passent beaucoup plus de temps que les hommes à s’occuper des enfants, ce qui contraint leur temps libre. Par ailleurs, les femmes ont généralement les activités les plus «domestiques» quand elles passent du temps avec leurs enfants tandis que les hommes ont des activités plus centrées sur les loisirs lorsqu’ils s’occupent de leurs enfants. En ce qui concerne les parents, la raison est en fait similaire : les femmes ont tendance à plus s’occuper de leurs parents lorsque ceux-ci vieillissent. Pourtant, même en contrôlant pour le secteur d’activité, la position hiérarchique et l’âge des parents, les femmes ont toujours un moindre plaisir à voir leurs parents. L'aspect sociologique et psychologique de la chose ouvre de nouvelles pistes de recherche pour les économistes...
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